Contre le middle management
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La division du travail induite par l'organisation scientifique du travail a
révolutionné l'industrie au 19ème siècle. Dans la même lignée, le taylorisme
prône l'établissement d'une "meilleure façon" de produire et de conditions
de rémunération objectives pour pousser plus loin la maximisation de la
productivité.

Voici mon sentiment : ces principes, pensés pour la production, s'immiscent
progressivement dans le tertiaire, via le middle management. Les tâches sont
découpées, pré-machées puis distribuées. La réalisation est de plus en plus
dirigée et surveillée.

Les conséquences du surdécoupage des tâches sont néfastes. Cela bride la
créativité du réalisateur, qui n'a plus le choix de la façon de faire. Les
tâches sont de moins en moins intéressantes. Pour favoriser l'interchangeabilité
du réalisateur, on nivelle par le bas les qualifications requises. La
réalisation d'une tâche devient vide de sens, d'âme. Le réalisateur est
dépossédé de la fierté de l'accomplissement de la tâche. Il n'a pas de raison de
se sentir concerné par la bonne réalisation de la tâche. Enfin, le découpage des
tâches facilite grandement la mesure de "performance", et ainsi permet la grande
mascarade perverse de la maximisation des KPI (indicateurs clés de performance).
On est pas loin de l'esclavagisme.

Par ailleurs, une très grande quantité d'énergie est nécessaire pour entrenir
cette gestion : découper les tâches, distribuer, surveiller le résultat pour le
gestionnaire, justifier de la bonne exécution pour le réalisateur. Censé
améliorer la productivité, cette gestion du travail se prend les pieds dans le
tapis, coulée par la dépense énergétique et le désintérêt provoqué chez les
réalisateurs.

Et si on arrêtait de prendre les gens pour des cons ? Si on leur faisait
confiance pour faire les choses bien sans les prendre par la main ? Et si on
avait un peu foi en l'humanité ? Ce serait plus épanouissant pour tout le monde.
Quant à la productivité, je parie qu'on serait agréablement surpris.